Parmi tant d ’autres monuments historiques, deux
temples taillés en roc à Abou Simbel sont menacés
par la montée des eaux du Nil, par suite à la construction
du Haut Barrage d’Assuan à Saad el Ali.
Au cours des 4 années (I960—IH963) plusieurs projets
de sauvegarde des deux temples furent élaborés,
à diverses dates et dans des conditions différentes.
Notamment, les uns étaient faits sur commande,
d’autres découlaient d’une idée spontanique, issue d’un
milieu particulier ou même d’une seule personne.
Abou Simbel est situé sur la rive du Nil, en
basse Nubie, sur le territoire de la République Arabe
Unie. Un climat sec, propre au desert, privé des précipitations
atmosphériques redgne sur ces terrains.
Des deux côtés du fleuve la rive est haute et roupestre.
Elle est formée du grès nubien, très éventé et
fissuré, par suite aux corrosions subies et dont la
résistence s ’élève à 100—200 kg/cm2. Les temples
creusés dans le roc se trouvent sur la rive occidentale.
Les eaux du fleuve coulent à leur pieds.
Durant de longs siècles les temples étaient engloutis
sous le sable. On ne les découvrit qu’au début
du X IX e siècle. Ils tirent leurs origines de l ’époque
où .reignait en Egypte un de ses roix les plus actifs.
Ramses II (env. 1298—1232 av. J. Ch.). L ’architecture
de ces temps manifeste une préférence pour l’aménagement
spacial des formes grandioses. Sur le territoire
de la Nubie toute une suite de temples creusés dans
les roches fut érigée à cette époque, dont les plus
grands se trouvent à Abou Simbel: le grand temple
qui appartenait au roi et le petit temple consacré à
la déesse Hathor et à la reine Nefertari. Tous les
deux se sont assez bien conservés à travers le temps,
grâce à la couche de sable qui les a protégé pendant
d ’assez longues années. Ce n’est que les hautes parties
de la construction qui sont restées au découvert et qui
sont endommagées , ainsi que le haut du colosse en
pierre légèrement affa issé le long d’une fissure naturelle
du roc. En règle générale, la cohésion des roches
non-homogènes et cravassées, est due à l ’équilibre des
poussées qui agissent au fond du massif. D’autre part
chaque atteinte portée à cet équilibré peut entraîner
des changements nettement défavorables pour la s t a bilité
du terrain.
L ’immersion des eaux, faisant suite à la construction
du Haut-Barrage aura lieu entre la I-ère et la
III-ème cataracte. Elle se répendra sur une longueur
d ’environ 500 km. Les plans de la construction prévoient
une montée d’eau progressive, jusqu’à 182 m
d’altitude par rapport au niveau de la mer, c’est à
dire environ 60 m. au-dessus du parquet du Grand
Temple. Au cours de cet hiver 1964/65, le niveau
des eaux montera déjà à 3 m. au-dessus du parquet
du Grand Temple, ce qui oblige dès maintenant à
construire un premier barrage de protection autour
du temple pour rendre possible la continuation des
travaux mis en train.
Les trois premiers projets ayant pour but la
sauvegarde des deux temples furent élaborés déjà
vers la fin de l ’année 1960. Voilà, en résumé, leur
caractéristique: _
1. Projet de la protection des monuments „in situ” ,
autrement dit, à la place où ils se trouvent actuellement,
par la construction d ’un batardeau fait de terre,
d’enrochements et du limon du Nil. Ce batardeau
entourerait les deux temples d’un demi-cercle, les
protégeant du côté du fleuve. Les auteurs de ce
projet, MM. A. Coyne et J. Bellier du Bureau F rançais
des Constructions, furent Chargés par l’UNESCO
d’élaborer des plans de protection, relatifs non seulement
à la sauvegarde des deux temples mais aussi
à la conservation des valeurs naturelles du site, qui
les entoure. Les hautes valeurs plastiques de ce projet
ont été généralement reconnues.
2. Exhaussement du monument en un seul bloc (Gazzola,
Italie). Suivant ce projet chacun des deux
temples serait découpé des roches qui l ’entourent,
cerclé d ’une construction protectrice en béton armé
et soulevé avec elle à l’aide de quelques centaines
de vérins dont l ’action serait synchronisée.
Un énorme socle se formerait au-dessous des
deux temples et constituerait pour ces monuments une base d ’emplacement définitif. Le projet en question
prévoit en plus d’autres travaux, notamment
le revêtement rocheux des deux temples effectué en
forme de collines artificielles sur le lieu de leur
nouvelle localisation. Cette conception novatrice donna
l ’essor à d’autres projets à base des moyens de
protection semblables.
3. Protection des temples „in situ” par une suite de
constructions aux formes concaves en béton armé
cerclant les deux temples. Le massif tout autour
serait rendu parfaitement étanche grâce à la méthode
d’électro-osmose employée pour le renforcement des
roches. Cette proposition envisage la protection des
monuments à frais minime, toutefois elle ne prend
pas en 'considération leur valeurs expositives (R. Cebertowicz,
Pologne).
Après avoir pris connaissance des projets précités
il fut décidé que le 'projet français malgré ses incontestables
valeurs ne peut être réalisé, étant donné la
nécessité permanente d’éliminer l ’immersion des eaux
extérieures. Le projet d’encercler les temples des
constructions concaves rendrait difficile leur accès et
leur visibilité. La conception italienne (P. Gazzola)
du déplacement des monuments en un seul bloc fut
adoptée au définitif le 20 juin 1961. Les spécialistes
suédois du Bureau d’Etudes (VBB) ont adhéré aux
travaux d ’élaboration technique de ce projet.
Néanmoins, les frais de réalisation du projet précité
se sont avérés très élevés, environ 80 millions de
dollars. Craignant ne pas pouvoir rassembler des fonds
adéquates et sous l’initiative de certains milieux intéressés,
on procéda à une étude approfondie de ce
problème, compte tenu cette fois des solutions plus
économiques.
En automne 1961, deux nouveaux projets de
sauveigarde furent élaborés en Pologne:. 1. la construction
de deux parois protecteurs légers, effectués
en béton armé. 2. levage hydraulique en un seul bloc
en utilisant la poussée verticale de l ’eau.
Dans le premier des deux projets précités (L. Dąbrowski),
on essaya de maintenir la conception de
protéger les temples sans démontage ni déplacement.
Le Grand Temple serait entouré d’un batardeau semi-
->drculaire dont le tracé aurait 160 m. de diamètre
au plus et les parois 2 à 4 m. d’épaisseur. Une construction
de forme cylindrique en béton armé entourerait
le Petit Temple. Elle serait placée perpendiculairement,
son tracé ne dépassant point 64 m. de
diamètre. Une couverture en verre est placée à l’intérieur
de cette construction, en mi-hauteur des p arois.
Les deux constructions précitées sont reliées
par un tunnel passant au-dessous des eaux. Une isolation
serait effectuée du côté de la rive et sous les
monuments, p ar un renforcement des roches à l’aide
d’injonctions et de drainages. Le second projet